我的叔叔于勒 中法双语对照

栏目:影视资讯  时间:2022-10-28
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  Mon oncles Jules我的叔叔于勒

  Un vieux pauvre, à barbe blanche, nous demanda l’aum?ne. Mon camarade Joseph Davranche lui donna cent sous. Je fus surpris. Il me dit :

  一个白胡子的穷老汉管我们要钱。我朋友约瑟夫·达伍朗什给了他五块。我吃了一惊。他和我说道:

  — Ce misérable m’a rappelé une histoire que je vais te dire et dont le souvenir me poursuit sans cesse. La voici :

  这个可怜人让我想起了一件事,这件事我一直记得,我来讲给你听吧。事情是这样的:

  Ma famille, originaire du Havre, n’était pas riche. On s’en tirait, voilà tout. Le père travaillait, rentrait tard du bureau et ne gagnait pas grand-chose. J’avais deux s?urs.

  我家以前在阿弗尔港,家里的条件一般,不过现在好多了。我父亲从前工作很忙,每天在单位忙活到很晚才回来,可是也没挣着几个钱。我还有两个姐姐。

  Ma mère souffrait beaucoup de la gêne où nous vivions, et elle trouvait souvent des paroles aigres pour son mari, des reproches voilés et perfides. Le pauvre homme avait alors un geste qui me navrait. Il se passait la main ouverte sur le front, comme pour essuyer une sueur qui n’existait pas, et il ne répondait rien. Je sentais sa douleur impuissante. On économisait sur tout ; on n’acceptait jamais un d?ner, pour n’avoir pas à le rendre ; on achetait les provisions au rabais, les fonds de boutique. Mes s?urs faisaient leurs robes elles-mêmes et avaient de longues discussions sur le prix d’un galon qui valait quinze centimes le mètre. Notre nourriture ordinaire consistait en soupe grasse et b?uf accommodé à toutes les sauces. Cela est sain et réconfortant, para?t-il ; j’aurais préféré autre chose.

  我母亲受不了这份穷,经常对我父亲说些难听的话,每句话都藏着怨气。我父亲听了一声不吭,只是拿手擦擦脑门,像要擦汗,可其实一滴汗也没有。我看了总是很难过,知道他心里有多不好受。我们家把钱把得很死,别人请客我们从来不去,免得以后还要还席;买东西从来只到商店的最里头翻,专挑那些减价处理的;我两个姐姐的衣服都靠自己做,为买条一毛五一米的带子能讲上半天的价。我们一天天吃的都是油乎乎的汤,还有不知道加了多少种作料的牛肉,虽然说吃了没病,又管饱,可我真想换点别的。

  On me faisait des scènes abominables pour les boutons perdus et les pantalons déchirés.

  那时我挨过不少呲,就因为丢了纽扣,或者弄破了裤子。

  Mais chaque dimanche nous allions faire notre tour de jetée en grande tenue. Mon père, en redingote, en grand chapeau, en gants, offrait le bras à ma mère, pavoisée comme un navire un jour de fête. Mes s?urs, prêtes les premières, attendaient le signal du départ ; mais, au dernier moment, on découvrait toujours une tache oubliée sur la redingote du père de famille, et il fallait bien vite l’effacer avec un chiffon mouillé de benzine.

  但每逢周日,我们全家准要穿上最好的衣服,一起到码头散步。我父亲戴上了手套礼帽,穿上了礼服,伸手挽着我母亲,我母亲活像一艘大船,为庆祝什么佳节披挂得花枝招展。我两个姐姐总是最先收拾好,就等着出门,可每到临走的时候,我父亲礼服上总能发现一块污渍,于是我们就得往布头上蘸点粗汽油,赶紧把脏东西擦去。

  Mon père, gardant son grand chapeau sur la tête, attendait, en manches de chemise, que l’opération f?t terminée, tandis que ma mère se hatait, ayant ajusté ses lunettes de myope, et ?té ses gants pour ne les pas gater.

  这期间,我父亲身穿衬衫头戴大礼帽等着,我母亲则调好近视镜,接着赶紧把手套脱下来,以免把它们弄坏了。

  On se mettait en route avec cérémonie. Mes s?urs marchaient devant, en se donnant le bras. Elles étaient en age de mariage, et on en faisait montre en ville. Je me tenais à gauche de ma mère, dont mon père gardait la droite. Et je me rappelle l’air pompeux de mes pauvres parents dans ces promenades du dimanche, la rigidité de leurs traits, la sévérité de leur allure. Ils avan?aient d’un pas grave, le corps droit, les jambes raides, comme si une affaire d’une importance extrême e?t dépendu de leur tenue.

  我们一家像过节似的上了街。我两个姐姐手挽手走在最前面,她们已经到了出嫁的年纪,正好到城里露露面。我跟在我母亲左边,我父亲走在右边。我依然记得我父母那郑重其事的样子,他们迈着庄严的步伐,腰板挺得笔直,腿绷得像打了石膏,仿佛穿了这身衣服就背负了什么重大的使命似的。

  Et chaque dimanche, en voyant entrer les grands navires qui revenaient de pays inconnus et lointains, mon père pronon?ait invariablement les mêmes paroles :

  每个周日,看着从遥远而未知的国度驶来的大船,我父亲总要说同一句话:

  — Hein ! si Jules était là-dedans, quelle surprise !

  “唉!要是于勒在上面就好了!”

  Mon oncle Jules, le frère de mon père, était le seul espoir de la famille, après en avoir été la terreur. J’avais entendu parler de lui depuis mon enfance, et il me semblait que je l’aurais reconnu du premier coup, tant sa pensée m’était devenue familière. Je savais tous les détails de son existence jusqu’au jour de son départ pour l’Amérique, bien qu’on ne parlat qu’à voix basse de cette période de sa vie.

  我的叔叔于勒,我父亲的兄弟,曾经是家里的扫把星,如今却是家里唯一的指望。我从小就听说过他,对他可以说知根知底,要是哪一天真和他碰上,我估计一眼就能认出来。从他出生到他去美国这之间的所有事我全都知道,虽然这些事家里人只敢小声议论。

  Il avait eu, para?t-il, une mauvaise conduite, c’est-à-dire qu’il avait mangé quelque argent, ce qui est bien le plus grand des crimes pour les familles pauvres. Chez les riches, un homme qui s’amuse fait des bêtises. Il est ce qu’on appelle, en souriant, un noceur. Chez les nécessiteux, un gar?on qui force les parents à écorner le capital devient un mauvais sujet, un gueux, un dr?le !

  他从前是个混世魔王,花钱如流水,这在穷人家可是滔天大罪。在有钱人家,要是谁挥金如土,人们也就笑着叫他一句“公子哥儿”。然而在穷苦人家,谁要是糟蹋了父母的钱,那他就是个无赖,混账,王八蛋!

  Et cette distinction est juste, bien que le fait soit le même, car les conséquences seules déterminent la gravité de l’acte.

  这不是什么双重标准,虽然都是挥霍,但二者有着不同的影响,因此才分出了轻重。

  Enfin l’oncle Jules avait notablement diminué l’héritage sur lequel comptait mon père ; après avoir d’ailleurs mangé sa part jusqu’au dernier sou.

  他把自己那份遗产花得一个子儿不剩,还把我父亲指着过日子的那份吞走了一大笔。

  On l’avait embarqué pour l’Amérique, comme on faisait alors, sur un navire marchand allant du Havre à New-York.

  于是家里把他送去了美国,让他跟着一艘从阿弗尔起航的大商船去了纽约。

  Une fois là-bas, mon oncle Jules s’établit marchand de je ne sais quoi, et il écrivit bient?t qu’il gagnait un peu d’argent et qu’il espérait pouvoir dédommager mon père du tort qu’il lui avait fait. Cette lettre causa dans la famille une émotion profonde. Jules, qui ne valait pas, comme on dit, les quatre fers d’un chien, devint tout à coup un honnête homme, un gar?on de c?ur, un vrai Davranche, intègre comme tous les Davranche.

  一到那边,我叔叔于勒就做起了什么生意,很快他写了封信,说自己挣了点钱,想要弥补当初对不起我父亲的地方。这封信在家里激起了千层浪。于勒,这个大家口中的废物,一下子变成了一个君子,一个善人,一个真正的达伍朗什,又重新被这个家接纳了。

  Un capitaine nous apprit en outre qu’il avait loué une grande boutique et qu’il faisait un commerce important.

  有个船长还告诉我们说他在那边租了个店面,干的是挺重要的买卖。

  Une seconde lettre, deux ans plus tard, disait : ? Mon cher Philippe, je t’écris pour que tu ne t’inquiètes pas de ma santé, qui est bonne. Les affaires aussi vont bien. Je pars demain pour un long voyage dans l’Amérique du Sud. Je serai peut-être plusieurs années sans te donner de mes nouvelles. Si je ne t’écris pas, ne sois pas inquiet. Je reviendrai au Havre une fois fortune faite. J’espère que ce ne sera pas trop long, et nous vivrons heureux ensemble...? ?

  两年后,他寄来了第二封信,信里写道:“亲爱的菲利普,我身体很好,不用担心。我这边都挺好的。我明天去南美洲,要在那儿待好长一阵。你这几年恐怕听不到我的消息了。要是一直没我的信也别着急,我一发了财就回阿弗尔,但愿咱们能早日团聚,一家人快快乐乐地过日子……”

  Cette lettre était devenue l’évangile de la famille. On la lisait à tout propos, on la montrait à tout le monde.

  这封信成了我们家的宝。我们一有时间就读,一碰见人就给他看。

  Pendant dix ans, en effet, l’oncle Jules ne donna plus de nouvelles ; mais l’espoir de mon père grandissait à mesure que le temps marchait ; et ma mère aussi disait souvent :

  十年来,我叔叔于勒音讯全无,可我父亲的信心却一日强似一日,连我母亲也经常把这句话挂在嘴边了:

  — Quand ce bon Jules sera là, notre situation changera. En voilà un qui a su se tirer d’affaire !

  “什么时候于勒回来,咱家的日子就变了。他可是咱家的救星!”

  Et chaque dimanche, en regardant venir de l’horizon les gros vapeurs noirs vomissant sur le ciel des serpents de fumée, mon père répétait sa phrase éternelle :

  每逢周日,望着从天际飘来的滚滚黑烟,我父亲永远是那句一成不变的话:

  — Hein ! si Jules était là-dedans, quelle surprise !

  “唉!要是于勒在上面就好了!”

  Et on s’attendait presque à le voir agiter un mouchoir, et crier :

  我们等得望眼欲穿,几乎能看见他挥舞着手绢,朝我们喊道:

  — Ohé ! Philippe.

  “喂!菲利普。”

  On avait échafaudé mille projets sur ce retour assuré ; on devait même acheter, avec l’argent de l’oncle, une petite maison de campagne près d’Ingouville. Je n’affirmerais pas que mon père n’e?t point entamé déjà des négociations à ce sujet.

  我们等着他衣锦还乡,计划了无数要买的东西,还打算用我叔叔的钱在安谷维勒附近置一栋乡间小屋。没准我父亲已经在筹备这事了。

  L’a?née de mes s?urs avait alors vingt-huit ans ; l’autre vingt-six. Elles ne se mariaient pas, et c’était là un gros chagrin pour tout le monde.

  我大姐那会儿已经二十八了,我二姐也二十六了。她们都没找着人家,她俩的婚事让家里伤透了脑筋。

  Un prétendant enfin se présenta pour la seconde. Un employé, pas riche, mais honorable. J’ai toujours eu la conviction que la lettre de l’oncle Jules, montrée un soir, avait terminé les hésitations et emporté la résolution du jeune homme.

  终于,有一个职员向我二姐求了婚,这小伙子虽然没什么钱,但是个老实人。我记得有天晚上家里把于勒叔叔的信拿给他看过,肯定是这封信帮他下定了决心。

  On l’accepta avec empressement, et il fut décidé qu’après le mariage toute la famille ferait ensemble un petit voyage à Jersey.

  家里一口答应下这门婚事,安排全家等二人成亲后去泽西岛玩。

  Jersey est l’idéal du voyage pour les gens pauvres. Ce n’est pas loin ; on passe la mer dans un paquebot et on est en terre étrangère, cet ?lot appartenant aux Anglais. Donc, un Fran?ais, avec deux heures de navigation, peut s’offrir la vue d’un peuple voisin chez lui et étudier les m?urs, déplorables d’ailleurs, de cette ?le couverte par le pavillon britannique, comme disent les gens qui parlent avec simplicité.

  对穷人来说,泽西岛是旅行的最好去处。那儿离我们很近,只要乘客轮跨过大海,我们就算是出国了,因为这个岛是英国的领土。只需要坐上两个小时的船,我们就可以见到邻国的居民,领略到他们的风俗习惯,据有些直性子的人抱怨说,那岛上盖满了英式小楼。

  Ce voyage de Jersey devint notre préoccupation, notre unique attente, notre rêve de tous les instants.

  这场旅行成为了我们唯一的盼头,大家时时刻刻都想着它。

  On partit enfin. Je vois cela comme si c’était d’hier : le vapeur chauffant contre le quai de Granville ; mon père, effaré, surveillant l’embarquement de nos trois colis ; ma mère inquiète ayant pris le bras de ma s?ur non mariée, qui semblait perdue depuis le départ de l’autre, comme un poulet resté seul de sa couvée ; et, derrière nous, les nouveaux époux qui restaient toujours en arrière, ce qui me faisait souvent tourner la tête.

  我们出发了。当时的情景我仍然历历在目:热腾腾的蒸汽涌上格朗维勒的码头,我父亲一脸惊慌地看着我们的三个行李箱被抬上船;我母亲满脸担忧地挽着我大姐的胳膊,我大姐从二姐出嫁起就仿佛丢了魂,和母鸡离了鸡窝似的;走在后面的是那对新婚的夫妇,他俩一直待在最后面,我总是回头去看。

  Le batiment siffla. Nous voici montés, et le navire, quittant la jetée, s’éloigna sur une mer plate comme une table de marbre vert. Nous regardions les c?tes s’enfuir, heureux et fiers comme tous ceux qui voyagent peu.

  汽笛鸣响。我们上了船,船驶离海港,开向那平滑如大理石的翠绿海面。我们望着海岸渐行渐远,满心的喜悦与自豪,但凡不常出门的人都是这样。

  Mon père tendait son ventre, sous sa redingote dont on avait, le matin même, effacé avec soin toutes les taches, et il répandait autour de lui cette odeur de benzine des jours de sortie, qui me faisait reconna?tre les dimanches.

  我父亲穿着礼服,礼服下藏着大肚子。出门这天早上,家里把他这件衣服擦洗得一尘不染,弄得他浑身都是粗汽油的味道,我一闻见就想起了那些个周日。

  Tout à coup, il avisa deux dames élégantes à qui deux messieurs offraient des hu?tres. Un vieux matelot déguenillé ouvrait d’un coup de couteau les coquilles et les passait aux messieurs, qui les tendaient ensuite aux dames. Elles mangeaient d’une manière délicate, en tenant l’écaille sur un mouchoir fin et en avan?ant la bouche pour ne point tacher leurs robes. Puis elles buvaient l’eau d’un petit mouvement rapide et jetaient la coquille à la mer.

  突然间,我父亲看见两位先生在请两名漂亮的女士吃牡蛎。有个脏兮兮的老水手拿刀撬开贝壳,把牡蛎递给两位先生,后者又接过来送给两名女士。她们吃得很雅致,先用一方手绢拎起贝壳,再探出嘴巴,以免弄脏了衣服,接着又飞快地轻轻一吸,最后把牡蛎壳扔进海里。

  Mon père, sans doute, fut séduit par cet acte distingué de manger des hu?tres sur un navire en marche. Il trouva cela bon genre, raffiné, supérieur, et il s’approcha de ma mère et de mes s?urs en demandant :

  看见人家在船上吃牡蛎,我父亲被这种风雅的举动迷住了。他觉得这么吃特别讲究,特别有风度,显得特别有身份,于是朝我母亲和我姐姐走过来,问道:

  — Voulez-vous que je vous offre quelques hu?tres ?

  “要我请你们吃牡蛎吗?”

  Ma mère hésitait, à cause de la dépense ; mais mes deux s?urs acceptèrent tout de suite. Ma mère dit, d’un ton contrarié :

  我母亲犹豫了一下,考虑着花销,但我两个姐姐立马就答应了。我母亲不大高兴地说道:

  — J’ai peur de me faire mal à l’estomac. Offre ?a aux enfants seulement, mais pas trop, tu les rendrais malades.

  “算了吧,我怕得胃病。给孩子尝尝就行了,少吃点,别吃坏了。”

  Puis, se tournant vers moi, elle ajouta :

  她又看了看我,说道:

  — Quant à Joseph, il n’en a pas besoin ; il ne faut point gater les gar?ons.

  “别给约瑟夫买,不用惯他。”

  Je restai donc à c?té de ma mère, trouvant injuste cette distinction. Je suivais de l’?il mon père, qui conduisait pompeusement ses deux filles et son gendre vers le vieux matelot déguenillé.

  我只好待在母亲身边,暗怪她偏心。我望着我父亲带着他女婿和我两个姐姐大摇大摆地走向那个破破烂烂的老水手。

  Les deux dames venaient de partir, et mon père indiquait à mes s?urs comment il fallait s’y prendre pour manger sans laisser couler l’eau ; il voulut même donner l’exemple et il s’empara d’une hu?tre. En essayant d’imiter les dames, il renversa immédiatement tout le liquide sur sa redingote et j’entendis ma mère murmurer :

  之前那两名女士刚刚走,我父亲教我两个姐姐怎么吃才能不把水洒出来,为了示范,他拿过一个牡蛎。他刚一模仿人家,就把壳里的水全洒到了衣服上,我听见我母亲嘀咕道:

  — Il ferait mieux de se tenir tranquille.

  “也不拿稳了再吃。”

  Mais tout à coup mon père me parut inquiet ; il s’éloigna de quelques pas, regarda fixement sa famille pressée autour de l’écailleur, et, brusquement, il vint vers nous. Il me sembla fort pale, avec des yeux singuliers. Il dit, à mi-voix, à ma mère :

  突然间,我父亲显得有些慌张,他退了几步,望着女儿女婿和那个老水手,然后匆忙走向我们。他脸色煞白,眼神也乱了。他悄声对我母亲说道:

  — C’est extraordinaire, comme cet homme qui ouvre les hu?tres ressemble à Jules.

  “奇了怪了,那个开牡蛎的长得跟于勒真像。”

  Ma mère, interdite, demanda :

  我母亲愣住了,问道:

  — Quel Jules ?...

  “哪个于勒?”

  Mon père reprit :

  我父亲答道:

  — Mais... mon frère... Si je ne le savais pas en bonne position, en Amérique, je croirais que c’est lui.

  “嗨...就是我兄弟...要不是知道他在美洲,我差点就当成他了。”

  Ma mère effarée balbutia :

  我母亲吓得结结巴巴:

  — Tu es fou ! Du moment que tu sais bien que ce n’est pas lui, pourquoi dire ces bêtises-là ?

  “烦人!你知道这不是他还说什么?”

  Mais mon père insistait :

  我父亲求道:

  — Va donc le voir, Clarisse ; j’aime mieux que tu t’en assures toi-même, de tes propres yeux.

  “你自己去看看吧,克拉丽丝,你自己去认认到底是不是。”

  Elle se leva et alla rejoindre ses filles. Moi aussi, je regardais l’homme. Il était vieux, sale, tout ridé, et ne détournait pas le regard de sa besogne.

  她走到我姐姐们身边。我也跟着去了,打量着那个水手。他又老又脏,满脸的皱纹,一心全扑在手里的活上。

  Ma mère revint. Je m’aper?us qu’elle tremblait. Elle pronon?a très vite :

  我母亲折了回去。我发现她在颤抖。她飞快地说道:

  — Je crois que c’est lui. Va donc demander des renseignements au capitaine. Surtout sois prudent, pour que ce garnement ne nous retombe pas sur les bras, maintenant !

  “应该是他。你快去问问船长。问的时候小心点,省得这个王八蛋又回来啃咱们,快去!”

  Mon père s’éloigna, mais je le suivis. Je me sentais étrangement ému.

  我父亲去了,我跟着他。我异常的激动。

  Le capitaine, un grand monsieur, maigre, à longs favoris, se promenait sur la passerelle d’un air important, comme s’il e?t commandé le courrier des Indes.

  船长是位高大瘦削的先生,留着长长的连鬓胡子,他在舷梯上走来走去,一副不可或缺的气派,仿佛掌管着和印度的通信似的。

  Mon père l’aborda avec cérémonie, en l’interrogeant sur son métier avec accompagnement de compliments :

  我父亲摆着架子凑上前,一边就人家的工作问长问短,一边还不忘奉承:

  ? Quelle était l’importance de Jersey ? Ses productions ? Sa population ? Ses m?urs ? Ses coutumes ? La nature du sol ?, etc., etc.

  “泽西岛重要吗?那儿有什么特产?有多少人口?有什么风俗?有什么习惯?环境怎么样?”等等等等。

  On e?t cru qu’il s’agissait au moins des états-Unis d’Amérique.

  他觉得起码也得提提美国。

  Puis on parla du batiment qui nous portait, l’Express ; puis on en vint à l’équipage. Mon père, enfin, d’une voix troublée :

  后来他又谈到这艘船,谈到船上的成员。终于,我父亲不安地问道:

  — Vous avez là un vieil écailleur d’hu?tres qui para?t bien intéressant. Savez-vous quelques détails sur ce bonhomme ?

  “您船上那个开牡蛎的老水手挺有意思的。您知道他的底细吗?”

  Le capitaine, que cette conversation finissait par irriter, répondit sèchement :

  船长聊到这会儿已经恼了,他冷冷地答道:

  — C’est un vieux vagabond fran?ais que j’ai trouvé en Amérique l’an dernier, et que j’ai rapatrié. Il a, para?t-il, des parents au Havre, mais il ne veut pas retourner près d’eux, parce qu’il leur doit de l’argent. Il s’appelle Jules... Jules Darmanche ou Darvanche, quelque chose comme ?a, enfin. Il parait qu’il a été riche un moment là-bas, mais vous voyez où il en est réduit maintenant.

  “那是个法国叫花子,我去年在美国碰见的,我正送他回国。他好像在阿弗尔有亲戚,不过他不想回去,说是欠他们的钱。他叫于勒,姓什么达朗芒什还是达朗伍什的,反正差不多这么个姓。他以前好像挺有钱,现在却沦落成这个样。”

  Mon père, qui devenait livide, articula, la gorge serrée, les yeux hagards :

  我父亲苍白得像死人一样,喉咙发紧,眼神惊恐,说道:

  — Ah ! ah ! très bien..., fort bien... Cela ne m’étonne pas... Je vous remercie beaucoup, capitaine.

  “哦!哦!好...好...我就知道...谢谢您,船长。”

  Et il s’en alla, tandis que le marin le regardait s’éloigner avec stupeur.

  他离开了,船长惊讶地望着他走远。

  Il revint auprès de ma mère, tellement décomposé qu’elle lui dit :

  他回到我母亲身边,我母亲也变了脸色,对他说道:

  — Assieds-toi ; on va s’apercevoir de quelque chose.

  “坐吧,别让人家看出来。”

  Il tomba sur le banc en bégayant :

  他瘫倒在长椅上,磕巴道:

  — C’est lui, c’est bien lui !

  “是他,真是他!”

  Puis il demanda :

  他追问道:

  — Qu’allons-nous faire ?...

  “怎么办?”

  Elle répondit vivement :

  她连忙说道:

  — Il faut éloigner les enfants. Puisque Joseph sait tout, il va aller les chercher. Il faut prendre garde surtout que notre gendre ne se doute de rien.

  “得让孩子们离远点。约瑟夫已经全都知道了,就让他去找她们吧。千万别叫咱女婿觉出有什么不对。”

  Mon père paraissait atterré. Il murmura :

  我父亲都吓傻了,咕哝道:

  — Quelle catastrophe !

  “老天哪!”

  Ma mère ajouta, devenue tout à coup furieuse :

  我母亲一下子火了,说道:

  — Je me suis toujours doutée que ce voleur ne ferait rien, et qu’il nous retomberait sur le dos ! Comme si on pouvait attendre quelque chose d’un Davranche !...

  “我就知道这个贼啥也干不成,现在又回来吃咱们了!你们达伍朗什家一个好东西没有!”

  Et mon père se passa la main sur le front, comme il faisait sous les reproches de sa femme.

  我父亲又拿手擦过脑门,和平时挨训时一样。

  Elle ajouta :

  她又说道:

  — Donne de l’argent à Joseph pour qu’il aille payer ces hu?tres, à présent. Il ne manquerait plus que d’être reconnus par ce mendiant. Cela ferait un joli effet sur le navire. Allons-nous-en à l’autre bout, et fais en sorte que cet homme n’approche pas de nous !

  “让约瑟夫去付牡蛎的钱。可别叫这个要饭的认出咱们,不然可就有好戏看了。咱们去船的另一头,离这家伙远远的!”

  Elle se leva, et ils s’éloignèrent après m’avoir remis une pièce de cent sous.

  他们给了我一枚五块,然后就走远了。

  Mes s?urs, surprises, attendaient leur père. J’affirmai que maman s’était trouvée un peu gênée par la mer, et je demandai à l’ouvreur d’hu?tres :

  我姐姐们还在那儿惊讶地等我父亲。我告诉她们母亲有点晕船,然后向老水手问道:

  — Combien est-ce que nous vous devons, monsieur ?

  “该给您多少钱,先生?”

  J’avais envie de dire : mon oncle.

  我真想说一句:叔叔。

  Il répondit :

  他答道:

  — Deux francs cinquante.

  “两块五。”

  Je tendis mes cent sous et il me rendit la monnaie.

  我给了他五块,他找了钱。

  Je regardais sa main, une pauvre main de matelot toute plissée, et je regardais son visage, un vieux et misérable visage, triste, accablé, en me disant :

  我看了看他那布满皱纹的手掌,看了看他那张苍老疲惫、饱经风霜的脸,自语道:

  — C’est mon oncle, le frère de papa, mon oncle !

  “这是我叔叔,我父亲的兄弟,我叔叔!”

  Je lui laissai dix sous de pourboire. Il me remercia :

  我给了他五毛的小费,他道谢道:

  — Dieu vous bénisse, mon jeune monsieur !

  “老天保佑您,好心的先生!”

  Avec l’accent d’un pauvre qui re?oit l’aum?ne. Je pensai qu’il avait d? mendier, là-bas !

  这完全是乞丐的腔调。我不禁想道,他在那边肯定要过饭!

  Mes s?urs me contemplaient, stupéfaites de ma générosité.

  我姐姐们吃惊地看着我,被我的施舍吓呆了。

  Quand je remis les deux francs à mon père, ma mère, surprise, demanda :

  我把两块钱还给我父亲,我母亲惊讶地问道:

  — Il y en avait pour trois francs ?... Ce n’est pas possible.

  “吃了三块钱?不会吧。”

  Je déclarai d’une voix ferme :

  我坚定地说道:

  — J’ai donné dix sous de pourboire.

  “我给了他五毛的小费。”

  Ma mère eut un sursaut et me regarda dans les yeux :

  我母亲猛然暴怒,瞪着我骂道:

  — Tu es fou ! Donner dix sous à cet homme, à ce gueux !...

  “败家子!拿五毛给这个家伙,给这个要饭的!”

  Elle s’arrêta sous un regard de mon père, qui désignait son gendre.

  我父亲给了个眼色,指了指女婿,我母亲这才收住。

  Puis on se tut.

  大家都不说话了。

  Devant nous, à l’horizon, une ombre violette semblait sortir de la mer. C’était Jersey.

  在我们面前,一片紫色的阴影渐渐从海面浮现,泽西岛到了。

  Lorsqu’on approcha des jetées, un désir violent me vint au c?ur de voir encore une fois mon oncle Jules, de m’approcher, de lui dire quelque chose de consolant, de tendre.

  快上岸的时候,我感到一种猛烈的冲动,我想再看一眼我叔叔于勒,陪陪他,跟他说几句宽心的话。

  Mais, comme personne ne mangeait plus d’hu?tres, il avait disparu, descendu sans doute au fond de la cale infecte où logeait ce misérable.

  然而他已经不见了踪影,因为没人吃牡蛎了。他一定回到了自己的住处,下到了恶臭的舱底。

  Et nous sommes revenus par le bateau de Saint-Malo, pour ne pas le rencontrer. Ma mère était dévorée d’inquiétude.

  我们回去的时候坐了另一艘船,以免再跟他遇见。我母亲的担忧都写在了脸上。

  Je n’ai jamais revu le frère de mon père !

  我再也没见过我的叔叔!

  Voilà pourquoi tu me verras quelquefois donner cent sous aux vagabonds.

  你有时候会看见我给流浪汉五块钱,这就是为什么。

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